Saison 2014-2015 – Concerto Köln & Giuliano Carmignola

Mardi 16 Décembre à 20H30
Auditorium St Pierre des cuisines

« éveiller des émotions chez l‘auditeur grâce à la perfection
de l‘ouvrage et au souffle de la passion.
»
MBL

Fondé en 1985 à Cologne, cet orchestre de chambre quelque peu atypique s’est spécialisé dans l’interprétation des œuvres instrumentales et vocales des XVIIe et XVIIIe siècles, l’une de ses ambitions principales étant de (re-)découvrir un bon nombre de compositeurs jusque là méconnus ou oubliés et d’apporter un éclairage nouveau aux grandes œuvres déjà révélées. Cette formation, qui se veut autonome, évolue de manière collégiale et se singularise par l’absence de chef permanent, la direction étant souvent confiée au premier violon. En fonction du répertoire abordé, les membres de l’orchestre font appel aux meilleurs chefs et solistes du moment.

Les nombreux enregistrements réalisés et hautement récompensés, la renommée internationale acquise au fil des saisons, témoignent de l’engouement et de l’adhésion que le Concerto Köln suscite auprès d’un public friand de nouvelles interprétations, qui reconnaît dans l’approche de ses musiciens un travail intense au service d’un juste équilibre entre recherche et pratique.

L’ouverture souhaitée d’un Centre de Musique Ancienne pourrait bien répondre au désir profond de l’ensemble de faire de Cologne la « Capitale de la musique ancienne ».
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Au programme

« « Concertos pour violon »

Charles Avison

(1709-1770)

Concerto XI en sol majeur tiré de « 12 Concertos in Seven Parts »

arrangement des sonates pour clavecin de Domenico Scarlatti (1685-1757)

Con Affeto – Allegro – Andante moderato – Vivacemente

Evaristo Felice Dall’Abaco

(1675-1742)

Concerto op. 2 n° 1 en ré mineur « Concerti a quattro da chiesa » (c. 1712)

Largo – Allegro – Andante – Allegro assai

Johann Sebastian Bach

(1685 -1750)

Concerto pour deux violons BWV 1043 en ré mineur

Vivace – Largo ma non tanto – Allegro

Francesco Durante

(1684 -1755)

 Concerto n° 2 en sol mineur

Affettuoso . Presto – Largo affettuoso – Allegro

Johann Sebastian Bach

(1685 -1750)

Concerto pour violon BWV 1041 en la mineur

[ - ] – Andante – Allegro assai

 

Concerto pour violon BWV 1042 en mi majeur

Allegro – Adagio – Allegro assai

 

Le programme propose une sorte de double mise en regard du concerto, forme musicale qui connut un grand succès dans l’Europe entière durant la période baroque. Compositeurs italiens, anglais et allemands sont réunis ici pour illustrer ses deux aspects, « grosso » et « soliste », autour de quelques œuvres du début du XVIIIe siècle.

 

La double étymologie possible de « concerto » recouvre l’idée d’une opposition [concertare] tout en induisant l’idée de dialogue [conserere]. Elle met en évidence la nécessité d’avoir en présence des groupes d’instruments qui par leur couleurs sonores, leurs lignes mélodiques distinctes, leurs dynamiques peuvent à la fois s’opposer ou s’unir au cours d’une même œuvre. Déjà présent dans les sinfonie, canzone, sonate, le « stile concertato » s’impose dès le début du XVIIe en Italie et marque ainsi l’avènement du style concertant. Deux formes vont dès lors coexister pendant plusieurs années.

Le « concerto grosso », dont Corelli reste l’un des maîtres du genre, présente une alternance de mouvements lents et rapides où le « concertino » (ensemble de solistes) s’oppose au « tutti » ou « ripieno » (ensemble des instrumentistes). Les cordes, avec le soutien de la basse continue, forment l’assise de l’ensemble et se répartissent entre le « concertino » et le « ripieno ». Par la suite les vents viendront enrichir le dispositif.

Le concerto pour soliste, de forme tripartite, donne la primeur à un seul instrument capable de se confronter à tout un orchestre. Deux mouvements rapides, monothématiques à l’origine, encadrent un mouvement lent très mélodique où le soliste est mis en valeur. Vivaldi, imité par tous ses contemporains, en demeure l’un des principaux initiateurs. S’adaptant à l’évolution du langage musical, des goûts en vigueur propre à chaque époque et aux progrès de la facture instrumentale, le concerto s’imposera comme l’une des formes majeures de la musique instrumentale.

 

Charles Avison

Avison, élève de Geminiani,* et admirateur de la musique italienne, s’intéresse aussi aux problèmes liés à l’esthétique et à l’interprétation qu’il développe dans son traité « An Essay on Musical Expression » publié en 1735. Organiste, il enseigne également la flûte, le clavecin, le violon et ses compositions connaissent un réel succès. En 1735 il inaugure une série de concerts sur abonnements dans sa ville natale de Newcastle. La musique de Domenico Scarlatti, très prisée à Londres, inspire particulièrement Avison qui réalise plusieurs arrangements « effectués à partir de deux livres de sonates pour clavecin » ** du compositeur italien.

Editées en 1744 sous l’appellation « 12 Concertos in Seven Parts done from two Books of Lesson for the Harpsichord composed by Sig’ Dominico Scarlatti » cette réalisation est une réussite à la fois musicale et financière qui permit aussi la diffusion du « concerto grosso » auprès d’ensembles d’amateurs.

 

* Francesco Geminiani, violoniste et compositeur italien s’établit à Londres en 1715.

 

** En 1738 paraissent à Londres les « Essercizi per Gravicembalo » et en 1739 Thomas Roseingrave, qui avait rencontré Scarlatti lors d’un séjour en Italie, publie les « XLII Suites de pièces pour le clavecin ».

 

Evaristo Felice Dall’Abaco

Après Modène * où il se produit à la cour en tant que violoniste, Dall’Abaco passa une grande partie de sa vie à Munich au service de Maximilien II Emmanuel de Bavière. Il fait valoir là ses qualités de violoncelliste et de chambriste au sein d’un orchestre réputé et accompagne le prince-électeur lors de ses déplacements en Belgique, aux Pays-Bas et en France où il fréquente plusieurs musiciens, s’initiant ainsi aux particularités du style français.** De retour à Munich, il exerce les fonctions de maître de chapelle et de maître de concert. Resté au service de Charles Albert qui succède à son père en 1726, Dall’Abaco s’adapte aux nouvelles tendances de l’époque faisant preuve d’une certaine modernité que l’on retrouve dans ses dernières œuvres.

Les 12 « Concerti a quattro da chiesa » de l’opus 2 paraissent en 1712. Ils adoptent soit la structure en 4 mouvements sur le modèle de la « sonata da chiesa » (jouée à l’église),*** soit la structure du concerto en 3 mouvements. Si le style du compositeur demeure très italien par l’esprit et la forme, sa faculté d’assimilation, alliée ici à une grande fraîcheur d’expression rendent son propos clair, vivant et séduisant.

 

* Pendant de très nombreuses années le duché de Modène, après Ferrare, appartient à la famille d’Este reconnue pour le soutien qu’elle apporta aux arts et aux lettres.

 

** Lors de la guerre de Succession d’Espagne ce prince-électeur fit alliance avec la France et combattit sur de nombreux champs de bataille européens.

 

*** Schéma le plus fréquent des 4 mouvements : – lent - grave et solennel, -vif - allegro  fugué, – lent - plus mélodique, – vif - adoptant souvent un rythme de danse.

 

Francesco Durante

Beaucoup d’incertitudes demeurent encore dans la biographie de ce compositeur napolitain qui consacra une grande partie de sa vie à l’enseignement et à la composition d’œuvres instrumentales et religieuses, ne montrant que peu d’intérêt pour l’opéra, contrairement à la plupart de ses contemporains. Originaire de Naples, c’est dans cette ville que Durante est engagé comme « maestro primo » dans les plus célèbres conservatoires.* Reconnu et estimé pour la qualité de son enseignement il forma toute une nouvelle génération de musiciens et plusieurs de ses élèves, dont certainement Pergolèse et Paisiello, connaitront la célébrité.

Durante composa une série de 8 « Concerti per quartetto » pour deux violons, alto, violoncelle et basse continue où se manifeste une grande liberté de forme et de style. Chaque concerto propose de 3 à 6 mouvements plus ou moins développés. L’utilisation du canon ou du ricercar évoque parfois un retour au style ancien qui voisine ailleurs avec une conception plus moderne de l’écriture à l’instar des compositeurs vénitiens. Cette singularité demeure dans le choix des dynamiques, des tempi, des contrastes entre les enchaînements rythmiques et mélodiques.

 

* Au XVIIIe siècle Naples compta jusqu’à quatre conservatoires. Le nom de plusieurs compositeurs de cette période reste attaché à ces lieux.

 

Johann Sebastian Bach

Les trois concertos pour violon, partitions originales, s’ils sont conçus dans la même veine créative, présentent toutefois quelques particularités propres à chacun.

C’est en tant que Kapellmeister de la cour d’Anhalt-Köthen entre 1717 et 1723 que Bach compose la plupart de ses œuvres instrumentales. Il dispose d’un orchestre de grande qualité comprenant plusieurs musiciens virtuoses * et montre un intérêt certain pour la forme du concerto qu’il pratique sous ses deux aspects. Très respectueux de l’héritage italien dans ce domaine, il en conserve la forme, alternant vivacité des mouvements rapides et expressivité des mouvements lents, et cet esprit jubilatoire ou méditatif si caractéristique du style italien. Il en enrichit cependant le langage à sa manière par l’utilisation plus rigoureuse du contrepoint, la densité de la polyphonie, le développement plus important des ritournelles et de leurs exploitations thématiques. L’introduction du da capo, de l’ostinato, d’épisodes fugués, la recherche d’un équilibre et d’un dialogue plus élaboré entre soliste(s) et orchestre révèle sa prédisposition pour une architecture bien ordonnée, souvent symétrique, sur laquelle peut venir se greffer une voix soliste. Il y manifeste aussi sa volonté de s’inscrire dans un courant novateur tout en restant fidèle à ses principes.

 

* Joseph Spiess et Martin Friedrich Marcus, membres de l’orchestre de Frédéric Ier roi de Prusse, étaient entrés au service du prince Léopold à Köthen. Il est probable que Bach composa ses trois concertos pour violon(s) à leur attention.

Interprètes

Concerto Köln

&

Giuliano Carmignola